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Infos pratiques

Mercredi 9 décembre 2020 à 14h30 > 18h30

Intervenant.e(s)

Marie Dumollard
ENAP / Rennes 1 /Arènes

Soutenance de thèse de Marie Dumollard

Titre de la thèse : Entrer dans l’âge adulte sous contrainte socio-judiciaire. Réception de l’action publique et gouvernementalité dans les parcours des jeunes judiciarisé·e·s au pénal au Québec.

Thèse de doctorat en cotutelle internationale présentée à l’École nationale d’administration publique dans le cadre du programme de doctorat en administration publique pour l’obtention du grade de Philosophiæ Doctor (Ph. D.) et à l’université de Rennes 1, école doctorale Droit et science politique.

Membres du jury :
– Tatiana Garakani, professeure agrégée (ENAP) et présidente
– Martin Goyette, professeur titulaire (ENAP) et co-directeur de thèse
– Patricia Loncle, professeure des universités (EHESP) et co-directrice de thèse
– Natacha Brunelle, professeure titulaire (Université du Québec à Trois-Rivières), rapporteure
– María Eugenia Longo, professeure agrégée (Institut national de la recherche scientifique), rapporteure

Résumé : Pendant leur jeunesse, les jeunes qualifié·e·s de contrevenant·e·s sont confronté·e·s à un double enjeu : d’une part, les défis relatifs à l’entrée dans l’âge adulte, plus complexes dans leur situation que chez leurs pair·e·s non délinquant·e·s ; d’autre part, ceux liés au désistement du crime, socialement attendu pour remplir les normes associées au statut d’adulte. Ces processus individuels non linéaires se déploient sur fond de prises en charge institutionnelles au sein de l’État pénal et de son système de justice juvénile, et/ou par l’État social dans le cadre des politiques sociales de jeunesse pour certains d’entre eux·elles. Aussi, cette thèse s’intéresse-t-elle à cette action publique sociojudiciaire – ou sociopénale – déployée en direction des jeunes judiciarisé·e·s au pénal. Elle vise justement à mieux comprendre ses modalités d’intervention telles que mises en œuvre auprès de ce public à un moment charnière des parcours de vie. Autrement dit, comment l’action publique sociojudiciaire soutient-elle, ou non, l’entrée dans l’âge adulte des jeunes dit·e·s contrevenant·e·s ?
Bâtie sur une perspective conceptuelle à la croisée du parcours de vie, de la gouvernementalité et de la réception de l’action publique, la recherche privilégie une analyse de l’action publique « par le bas ». Elle interroge à ce titre les jeunes judiciarisé·e·s au pénal qui en sont destinataires et deviennent en ce sens des agent·e·s d’influence de sa mise en œuvre. À partir d’une méthodologie qualitative et compréhensive, les récits de vie de 15 jeunes hommes et une jeune femme suivi·e·s dans le cadre de mesures pénales effectuées dans la communauté ont ainsi été recueillis.
Les résultats s’articulent autour de quatre grands axes. 1) Les prises en charge institutionnelles passées occupent une place marquante et centrale dans les parcours juvéniles en transition. Plus précisément, l’enfermement et la prédominance de la logique pénale de contrôle au détriment d’une logique sociale, partenariale et intégrée d’accompagnement teintent les expériences qui ponctuent les parcours juvéniles. 2) Un continuum de réception de l’action publique se dessine alors, témoignant de la modulation des formes de l’intervention sociojudiciaire en fonction de deux profils de jeunes et de leur parcours antérieur. 3) Les conséquences positives des interventions sociojudiciaires sont minimisées par leur double caractère paradoxal et contradictoire. 4) Dans ce contexte, les jeunes judiciarisé·e·s dans le système québécois de justice des mineur·e·s adoptent des stratégies ambivalentes, entre conformité et résistance aux changements attendus d’une part, entre sollicitation et mise à distance des soutiens sociaux d’autre part.
Cette thèse contribue finalement à une meilleure compréhension des supports apportés à une catégorie de jeunes généralement considérée à travers la question de la délinquance. Ce faisant, elle nourrit les réflexions sur les hybridations entre État pénal et État social et caractérise les formes de la responsabilisation individuelle qui traversent les interventions sociojudiciaires portées en direction des jeunes judiciarisé·e·s dans le système québécois de justice des mineur·e·s.