Motion contre la réforme des retraites
Ayant parmi nous des spécialistes des questions de protection sociale et d’inégalités sociales de santé, mais aussi en tant que citoyens, nous nous alarmons des effets de la réforme dont il est établi qu’elle va aggraver ces inégalités sociales et de santé, dont les inégalités de genre, et dégrade ce pilier de la protection sociale. De nombreuses pistes de réforme alternatives ont été avancées pour assurer la pérennité du système de retraite.
De même, en tant que spécialistes des mouvements sociaux et des processus politiques et comme citoyens, nous constatons l’ampleur, la durée et la diversité de la protestation contre le projet gouvernemental, qui s’est étendue depuis plusieurs mois des grandes villes jusqu’aux plus petites communes, soutenue par un front commun rare des organisations syndicales et un engagement de la jeunesse lycéenne et étudiante.
En tant que scientifiques attachés à un fonctionnement démocratique des institutions, nous nous inquiétons du contournement par le pouvoir exécutif des règles du débat démocratique au Parlement, par des artifices de procédures et le recours à l’article 49.3 pour éviter un désaveu de sa politique. Nous nous inquiétons aussi de sa dérive autoritaire, du choix de la criminalisation du mouvement social et d’une brutalisation du maintien de l’ordre face aux manifestant.e.s, ses attaques contre les libertés fondamentales ainsi que celles et ceux qui les défendent.
Cette réforme aura en particulier des effets délétères sur nos carrières et conditions de travail déjà dégradées dans l’enseignement supérieur et la recherche comme dans d’autres secteurs. Nous refusons de nous résigner à l’aggravation de la situation des vacataires et précaires sur qui repose aujourd’hui une grande partie des enseignements et de la recherche. Pour ces personnels, mais aussi pour les salariés statutaires, la réforme va allonger fortement le temps d’activité, jusqu’à 70 ans, du fait d’un recrutement tardif dans nos métiers, après des années d’études non rémunérées, des contrats intermittents ou non pris en compte comme pour les post-doctorats internationaux. Par l’allongement des carrières, elle va également renforcer le goulet d’étranglement existant entre la soutenance de thèse et le recrutement pérenne. Ce recul de l’âge de la retraite et la réduction de la pension versée atteindront particulièrement nos collègues femmes dont le parcours reste marqué par des interruptions et des niveaux moindres de responsabilité et de rémunération.
Plutôt que de détériorer encore plus nos conditions de vie et de travail, il est nécessaire non seulement d’abandonner cette réforme des retraites, mais aussi d’améliorer les modalités de rémunération des plus précaires : c’est le sens de la revendication d’un doublement par les universités du tarif des vacations, demande portée par des collectifs de précaires et à laquelle le laboratoire s’associe.
Nous appelons tous les membres du laboratoire à participer activement aux réunions d’informations, assemblées générales et manifestations d’opposition à cette réforme dans nos établissements respectifs ; à réduire autant que possible leurs activités professionnelles afin de dégager le temps pour organiser, animer ou contribuer à ces mobilisations, notamment dans le cadre syndical ; à chercher des formes de coordination et d’action collective avec les autres laboratoires engagés dans cette action