Orienter et activer : les projets coopératifs d’énergie renouvelable à l’épreuve du marché
Une comparaison multi-niveaux Danemark, France, Royaume-Uni

Wokuri Pierre
Sous la direction de : Romain Pasquier

Année de début : 2015
Date de soutenance : 22/10/2020
Discipline : Science politique
Localisation : IEP Rennes
École doctorale : ED DSP
Affiliation : Rennes 1

Résumé

La transition énergétique, tantôt utilisée comme mot d’ordre politique, tantôt comme notion analytique, est souvent mobilisée pour exprimer un changement important dans l’organisation et le contenu des politiques énergétiques, ainsi que des comportements collectifs et individuels. La présente thèse s’est attachée à examiner l’une des dynamiques de cette dite transition en analysant la mise en action d’initiatives de production et de distribution d’électricité d’origine renouvelable par des acteurs collectifs citoyens, seuls ou en partenariats avec d’autres acteurs de marché : les projets coopératifs. La thèse s’articule autour de trois niveaux d’analyse : les régimes nationaux de politique publique de l’électricité, les organisations collectives représentant les intérêts des projets coopératifs et neuf organisations coopératives. La thèse montre que la participation des projets coopératifs s’explique par deux formes de pouvoir économique : le pouvoir d’orientation et d’activation. Le premier désigne la capacité des organisations collectives des projets coopératifs à orienter et s’orienter au sein d’un régime de politique publique pour créer des possibilités de mise en marché. Le second désigne la capacité des projets coopératifs à activer des possibilités (juridiques, financières, sociales et politiques), présentes à l’état latent dans le régime de politique publique et nécessaires pour leur concrétisation. À partir d’une enquête qualitative (entretiens semi-directifs, observations, analyse de documents de politique publique, business plan…) et comparative (Danemark, France et Royaume-Uni), la thèse entend contribuer à la compréhension des dynamiques de changement dans l’action publique, de la trajectoire d’une innovation au sein d’un marché et des relations entre activités économiques, action publique et action collective, tout en enrichissant la prise en compte des modèles ou styles de politiques publiques via la notion de régime de politiques publiques. Si les trajectoires nationales diffèrent, les contenus des mix électriques se distinguent, les cas britanniques, danois et français convergent toutefois autour d’un résultat commun : la participation neutralisée des projets coopératifs. Dans ces trois États, ces initiatives restent cantonnées au statut de niches dont la diffusion est partielle et sont neutralisées. La thèse identifie quatre éléments décisifs pour expliquer cette neutralisation : (i) les difficultés des organisations collectives des projets coopératifs à institutionnaliser les avantages obtenus ; (ii) les difficultés des projets coopératifs à orienter les régimes vers une reconnaissance de leur spécificité ; (iii) la faible autonomie des projets coopératifs dans l’exercice d’un pouvoir d’orientation ; (iv) les difficultés à créer des circuits de commerce autonomes et propres aux projets mis en action. Si les projets coopératifs parviennent parfois à s’insérer dans des marchés nationaux, leur contribution au changement reste relativement mineure dans l’état actuel des contraintes politiques et économiques qui pèsent aux niveaux nationaux.